De nos rapports avec les Dominicains,
Faut-il en rire ou faut-il en pleurer ?
Les expulsions de citoyens haïtiens par les voisins dominicains se font à un rythme effréné depuis des jours. Nous avons aussi des outils de représailles, mais nous avons peur de les utiliser. Nous sommes tellement à genoux, affaiblis, que nous avons peur de lancer ce dernier coup qui enverrait l’adversaire pourtant ad patres. Mais je me rends compte que tout Cela finira par passer, et nous recommencerons pour la plus belle dans nos rapports inégaux avec eux..
Ceux-là qu’on nous renvoie, ce sont ceux qui fuient la misère haïtienne vers un ciel plus clément. Ils sont là- bas dans l’industrie hôtelière, dans les champs de canne à sucre, dans les rues comme mendiants et comme prostituées..Autrefois nous leur envoyions des braceros et ils nous envoyèrent des prostituées pour les cafés et les boites de nuit de la place. Aujourd’hui ils nous envoient des produits qui sont fabriques uniquement pour la consommation haïtienne comme si nous étions incapables de les fabriquer nous-mêmes. Par contre ils gardent les prostituées, car c’est nous qui allons désormais les trouver là-bas Il ya tellement de terre vierge en Haïti, dans le plateau central et partout ailleurs, que nous pourrions nourrir toute la caraïbes en produits alimentaires de qualité saine et naturelle.
Pourtant nous investissons dans des appartements en république voisine comme si nous ne pouvions pas les construire chez nous. Des millions de dollars traversent la frontière pour offrir une éducation au rabais à nos compatriotes alors que nous avons assez de professionnels pour une dizaine de campus universitaires à travers tout le pays ,ce qui aiderait à garder chez nous une bonne partie de cet argent.. Ce n’est pas tant que l’étranger nous fait souffrir mais nous semblons tous devenir fous comme si, pour reconstruire ce pays, il faut le réduire en cendres et repartir à zéro. Nous nous en tenons tant à nos points de vue et à nos idées personnelles que chacun semble avoir le secret absolu et la somme de toutes les vérités. Mais en vérité, même sur ces cendres, nous semblons vouloir encore nous battre entre nous et y mettre encore plus d’huile et de feu. .Nous n’avons plus de honte de nos bêtises, ni de fierté de ce que nous étions et de ce que nous pouvons encore faire. . Pourtant avec une ou deux bonnes saisons pluvieuses, des camions qui déversent des travailleurs sur nos plaines fertiles mais sous-exploitées, sous l’égide de citoyens patriotes et consciencieux, avec des encadrements techniques appropriés, et une administration sérieuse, nous remonterions la pente bien plus vite que nous ne le croyons possible. Nous sommes tous dans un bateau à la dérive. Le capitaine est ivre et les passagers sont ivres. Le Titanic s’est achoppé contre un récif mais encore, buvons nous et dansons nous. Les signaux de détresse ne parviennent pas jusqu’à terre.et nous périssons tous : Voila notre situation !
Et pourtant, plus nos voisins nous font souffrir, plus nous semblons les aimer .Nous avons fini par développer le Syndrome de Stockholm où nous aimons et tombons amoureux de nos ravisseurs. Nous n’avons même plus la force de lutter et de nous relever.
Les Dominicains ont le droit de défendre leur territoire. Ils mettent des ressources médicales à la disposition de leurs citoyens quand c’est un maigre 4% du budget de l’état haïtien qui est consacré à la santé en Haïti. Alors, pourquoi nous plaindre de ce qu’ils soient allés dans les hôpitaux de la frontière pour chasser les femmes haïtiennes qui sont venues chercher des soins ? Pourtant nous avons assez de ressources pour vivre en toute Independence. Ce qui empêche de prendre soin de notre peuple, ce sont les gaspillages et les privilèges éhontés qui enlèvent au plus grand nombre ce qui lui revient de droit. Il faut en finir avec les privilèges accordés à un petit groupe..
C’est une bonne chose qu’ils nous coupent des visas. Ce serait une bonne chose s’ils fermaient la frontière et ne déchargeaient pas leurs produits fétides sur Haïti, Peut être arriverions nous à une certaine prise de conscience et changerions nous notre comportement vis-à-vis de notre pays. Nous sommes tellement hypocrites, et un peuple de faire semblant, que nous cachons nos douleurs même lorsque nous sommes piétinés par les étrangers. Pourtant, entre nous nous ,nous nous entre- déchirons sans fin. Je n’ai pas grandi dans le spaghetti et le Corn flakes qui viennent de l’autre coté de la frontière..Mon père était un grand fermier. j’ai été nourri des tiges de canne a sucre, des bougons de maïs, des mangues et des avocats , des régimes de banane qui sortaient de nos champs. Cela est encore possible aujourd’hui en Haïti. Malheureusement, nous sommes enchainés dans notre esprit , ce qui nous rend incapables de penser et de réfléchir. Notre Independence ne nous a servi à rien .Il n’ya presque plus de différence ente l’Haïtien de classe moyenne , paresseux et amant de luxe et de luxure, prédateur des biens de l’état, gaspilleur des deniers publics d’un coté, et le noir américain en général qui ferait tout pour acheter le sneaker dernier cri à son fils. . Nous avons oublié qui nous sommes et nous ne nous reconnaissons plus.
Si je devais choisir entre rire et pleurer du sort de mon pays, je me garderais de rire, de ce rire fou qui ne semblerait répondre qu’à des pulsions hallucinatoires. J’ai alors choisi la honte et les pleurs comme expressions de mes sentiments
Ronny Jean-Mary, M.D. Coral Springs,Florida.
Le 14 novembre 2021