De nos rapports avec les voisins Dominicains,
Faut-il en rire ou faut-il en pleurer ? 

Les expulsions de citoyens haïtiens par les voisins dominicains se font à un rythme effréné depuis des jours. Et ce n’est pas la première fois que cela arrive. A chaque contentieux qui surgit entre les deux peuples, c’est toujours l’occasion de représailles  massives de la part des Dominicains comme s’ils étaient les seuls à avoir tous les leviers de commande et que nous étions condamnés à tout accepter sans rien dire , ni rechigner. La décision prise  par les habitants de Ouanaminthe de reprendre la construction d’un canal d’irrigation pour arroser les terres de la plaine de Maribareaux  est devenue soudain  une  raison de plus   pour  provoquer un tollé,un  tantrum  même  d’ enfants gâtés chez les Dominicains et  particulièrement chez les Ultranationalistes de tous bords  avec à leur tète le président Luiz Abinader.

Coté injuste de l’affaire, les Dominicains auraient déjà eu onze prises sur la rivière Massacre alors que nous n’en sommes qu’à notre toute première prise.

C’est comme nous dire, dans une arrogance outrecuidante, que nous autres les Dominicains, nous produirons pour vous  tout ce dont vous aurez besoin vous les Haïtiens, et que vous pouvez continuer à nous envoyer cette main d’œuvre taillable et corvéable que nous embaucherons dans la Zaffra et dans nos champs agricoles.

.Avec un mépris déconcertant,  j’ai entendu  un jeune sénateur clamer haut et fort que la construction du canal en Haïti est une menace pour la sécurité de la République Dominicaine. Nous avons réduit notre pays à une telle  posture d’enfant docile, sans colonne vertébrale, que même le Dominicain le plus lignard se fait  maintenant passer pour un  donneur  de leçons à notre pays et se croit être nos maitres.                                A dire vrai, ici, l’enjeu est économique plus que toutes autres choses.

De même, à entendre parler sur la télévision voisine un autre Sénateur, le pays dominicain devrait se sentir béni d’avoir un pays aussi pauvre comme Haïti pour voisin .Car, renchérît-il , c’est une aubaine d’avoir à payer presque rien à ces gens qui travaillent pour nous.Mais ce Sénateur  aurait dû  ajouter  que souvent, ces Haïtiens   sont ont arrêtés et  rançonnés régulièrement  les vendredi après-midi  avant d’être payés pour leur semaine de de  travail,  ce qui laisse aux patrons dominicains tout l’argent pour lequel ils ont verse  sueur et  sang toute la  semaine ou tout les temps d’avant. J’avais envie de vomir quand ‘j’ai entendu le Sénateur prononcer de tels propos infames  à l’endroit de mon pays.. ET moi Dessalinien et Charlemagne peraltien de sang, je sentais tout mon être se remuer au-dedans de moi .Je me demandais alors, comme à chaque fois  que mon patriotisme et ma dignité d’haïtien se trouvaient outragés et blessés, comment en sommes nous arrivés si bas ? Comment des nègres qui ont tout basculé de l’ordre mondial injuste d’avant 1804 en soient parvenus à une telle soumission ou à une telle décrépitude ?

Ce n’est pas la première fois que les Haïtiens sont malmenés ,voire maltraités par les Dominicains .Mais il faut reconnaitre  que les gouvernements prédateurs, dilapidateurs de deniers publiques qui se sont succédé au pouvoir en Haïti pendant ces trente  dernières années n’ont pas été plus tendres envers les Haïtiens, leurs propres frères.

En effet, Ce  n’est que 4% seulement  du budget national qui sont alloués à la santé dans notre  pays. Et où va le reste du budget ? dans des trous noirs où tout est dépensé ou détourné sans aucune reddition de compte.

Alors comment s’attendre à ce que l’on vous respecte  là-bas quand 35% des lits de maternité sont occupés  par des femmes Haïtiennes qui vont accoucher chez les dominicains au dire du président Abinader ?

Où sont donc  passées notre fierté de peuple, notre responsabilité en tant que  dirigeants, et notre vision du pays que nous sommes appelés à construire ?

Nous avons fait tout un tollé  au tour du canal à construire et c’est de bon droit car l’eau a pris sa source en territoire haïtien et ce sont les Dominicains qui en profitent presqu’exclusivement.

Il faut d’autres canaux pour amener l’’eau dans les plaines et produire davantage de nourriture et nous soustraire une fois pour toutes à   la dépendance alimentaire vis-à-vis de nos voisins.

….Et c’est de cela qu’ils ont peur. Ils ont peur qu’ils ne soient plus capables de nous tenir par le ventre, ni  pouvoir nous faire du chantage à tout moment.

Pourquoi ne pas garder la frontière fermée bien plus longtemps du coté haïtien puisque c’était fermé sans notre avis, et nous mettre au travail rapidement pour des solutions alternatives. ?

Que disent les ministres du commerce et de l’industrie, , du développement rural  et de l’Agriculture  dans tout cela. ?

Que font- ils pour parer à ces genres de défis qui vont encore arriver à. l’avenir ?

Pardon, j’avais oublié que ces ‘’ sans vergogne ‘’sont entrain de casher leurs chèques de fin de mois pour lesquels ils n’on t rien fait ou point travaillé.

Moi,  ce que je redoute de tout cela , c’est que nous sommes un peuple vacillant, « «feu  de paille de maïs » qui ne va jamais jusqu’au bout dans ses revendications, et qui laisse souvent  les autres décider à notre place.

Dans quelques jours, lorsque sous la pression des grands fermiers dominicains ou des  latifundios , et due à une perte énorme en revenus et en produits agricoles, la frontière sera ré-ouverte, nous allons tous y précipiter  tête baissée, et oubliant l’affront subi de la part des  Dominicains.

Je me rends compte malheureusement, que tout cela finira par passer, et nous recommencerons  pour la plus balle dans nos rapports inégaux avec eux.

Aujourd’hui,  ils nous déchargent  des produits avariés, de mauvaise qualité,, faits uniquement pour être consommés en Haïti, comme si notre bourgeoisie marchande et compradore  était incapable de les produire localement. Mais c’est plus facile de gruger le peuple en lui revendant deux ou trois fois plus chers ces produits avariés. achetés des Dominicains.

Il ya tellement de terres fertiles, dans le plateau central, dans l’Artibonite, et partout ailleurs dans le pays, que nous pourrions nourrir toute la caraïbe en produits alimentaires de qualité saine et naturelle.

Pourtant, avec l’argent volé de nos contribuables,  nous préférons investir dans des appartements luxueux en République voisine comme si nous ne pouvions pas les construire  ici en Haïti.

Avec deux bonnes saisons pluvieuses, des camions qui déversent des travailleurs sur nos terres fertiles pour les faire fructifier, et sous l’égide de citoyens patriotes et consciencieux, sans omettre un encadrement technique approprie, nous remonterions la pente de insécurité alimentaire bien plus vite que nous ne le croyons possible.

De même, ce sont, des millions de dollars qui sont dépensés annuellement  pour offrir à nos jeunes  une éducation au rabais  en terre dominicaine alors que nous avons de fins professionnels qui auraient pu s’organiser et  fonder des campus universitaires dans presque tous les départements géographiques du pays

Malheureusement,  Ils refusent  de laisser la capitale insalubre et puante car, c’est là  qu’ils espèrent tomber sur une aubaine ou faire un bon coup qui les dispenserait de travailler pour le restant de leur vie.

Les intellectuels haïtiens n’ont jamais regardé le monde d’en dehors pour l’intégrer dans leur plans  et projets  et pour composer avec. Un pays, ca se construit, Nous voulons aller jouir de tout ce qui est beau là-bas et nous oublions que là-bas ce  n’est pas chez nous.

Haïti reste un beau pays, mais ce sont les dirigeants inconscients, le manque de leadership qui sont les vraies causes de nos malheurs..

Parfois  je me dis que ce n’est pas tant que les autres ne sont en partie responsables de nos maux, mais  nous ne semblons rien vouloir faire pour nous délier  de l’emprise étrangère et  nous servir de nos propres moyens  à  nous.

Plus nos voisins nous fon t souffrir, c’est plus nous semblons les admirer et courir après eux. Nous sommes un peu frappés du Syndrome de Stockholm où nous  finissons  par tomber amoureux de nos ravisseurs. .Nous n’avons plus  honte de nos bêtises, aucune  fierté de ce que nous étions et de ce que nous pouvons  encore faire. .    Malheureusement, nous semblons être  tous dans un bateau à la dérive où le capitaine est ivre et les passagers sont ivres. C’est comme le  Titanic  achoppé contre un  récif alors que tous, encore et encore, nous buvons et nous dansons ..                               Les  signaux de détresse  ne parviennent pas jusqu’à terre, ou aux oreilles de ceux qui nous dirigent. et nous allons tous périr : Voila notre  situation !

Pour finir,, disons que les                                                                                           Dominicains  ont le droit de défendre leur territoire. Ils mettent des ressources médicales à  la disposition de leurs citoyens quand c’est un maigre 4% du budget de l’état haïtien qui est consacré à la santé en Haïti, quand l’hôpital général de Port-au-Prince, le plus grand centre hospitalier du pays, est dans un état de délabrement absolu..   Alors, pourquoi nous plaindre  qu’ils soient allés dans les hôpitaux  de la frontière pour chasser les femmes haïtiennes qui sont venues chercher des soins chez eux quand  nous avons assez de  ressources ici pour vivre en toute Independence. Ce qui empêche de prendre soin de notre peuple, ce sont les gaspillages et les privilèges éhontés qui enlèvent au plus grand nombre ce qui lui revient de droit.  Il faut en finir avec les privilèges accordés  de toujours à un petit groupe de citoyens…                                                           Je pense que c’est une bonne chose qu’ils nous coupent des visas. Ce serait une bonne chose s’ils fermaient la frontière  et ne déchargeaient pas leurs produits avariés sur Haïti, Peut être arriverions nous  à une certaine  prise de conscience et changerions nous  notre comportement vis-à-vis de notre pays. . Parfois je me demande si cette Independence nous a vraiment servi à quoi que ce soit d’utile.  Car nous semblons être   enchainés dans notre esprit, incapables de penser et de réfléchir  autour des grands sujets qui concernent la nation

En vérité, si je devais choisir entre rire et pleurer du sort de mon pays, je me garderais de rire, de ce rire fou qui ne semblerait répondre qu’à des pulsions hallucinatoires.

Je choisirais  alors  la honte, le silence et les  pleurs comme expressions de mes sentiments.

 

Rony Jean-Mary,M.D.
Coral Spring, Fl.
le 14 Novembre 2021

 

 

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